Une vie bâtie dans l’amour, jusqu’à l’épreuve de la maladie et du deuil
Le témoignage de Joane Dubé, proche aidante à Chartierville

Joane et Mario, en 1995.
Une vie bouleversée par l’amour et la maladie
« C’était du brouhaha en permanence », raconte Joane Dubé, en se remémorant les semaines intenses qui ont précédé le décès de son conjoint, Mario Lauzon. Son témoignage illustre avec force ce que vivent de nombreux proches aidants : l’amour, la fatigue, la solitude, mais aussi la solidarité et la résilience.
Le parcours de Mme Dubé est marqué par une relation de 21 ans avec Mario, née d’un véritable coup de foudre. À l’époque, Mario est déjà paraplégique à la suite d’un accident de moto survenu à l’âge de 24 ans. Après une période d’adaptation, il fait preuve d’une grande résilience : il retourne aux études universitaires, obtient un diplôme, puis entame une belle carrière à Montréal. Malgré son handicap, il conserve une grande autonomie et mène une vie relativement normale. « Je ne voyais pas son fauteuil », dit-elle avec tendresse.
Cela n’empêche pas Mme Dubé d’accomplir certaines tâches supplémentaires. « Ça allait plus vite quand je m’occupais de sortir et rentrer le fauteuil de la voiture, par exemple! »
Une première expérience éprouvante : neuf mois à bout de souffle
Mme Dubé vit une première épreuve majeure. À cause d’une plaie sérieuse, Mario doit rester alité. Elle raconte cette période comme l’une des plus lourdes : travailler à temps plein, effectuer toutes les courses, gérer la maison, et assurer les soins quotidiens.
« J’étais toujours en train de courir. Je préparais les repas, je m’occupais des commissions, et je revenais à la maison pour veiller sur lui. » Une période d’épuisement, où le rôle d’aidante prenait toute la place.
Heureusement, après neuf mois, son mari se rétabli.

En juin 2011.

« au milieu de son rêve »
Le rêve d’une maison et la brutalité du diagnostic
À la retraite, le couple s’installe à Chartierville, village natal de Mario, pour réaliser son rêve de jeunesse : bâtir une maison en bois rond. Mais l’automne 2011 marque une rupture brutale. Mario est hospitalisé et apprend qu’il est atteint d’un cancer généralisé.
« Il m’a dit qu’il lui restait quelques mois à vivre. Mais ce n’est probablement pas ça ce que les médecins lui avaient dit à lui. » Trois semaines après avoir emménagé dans leur maison, le 30 décembre, Mario rend son dernier souffle dans ses bras.
Un quotidien accablant
Pendant ces semaines, Mme Dubé assume seule une charge immense. « J’ai gradué comme infirmière », dit-elle, pour exprimer tout ce qu’elle a dû apprendre : pansements, culottes d’incontinence, soins intimes, gestion des plaies.
Et comme si cela ne suffisait pas, la maison était encore remplie de contracteurs et de défis à gérer pour leur maison qui est alors encore en pleine construction.
La force de l’entourage
Si elle a réussi à traverser cette tempête, c’est grâce à la solidarité de ses proches. « Les gens m’ont appuyée, ils sont venus déneiger mon entrée, ils sont venus passer du temps avec lui pour me permettre de faire d’autres tâches importantes. »
Après le décès de Mario, elle garde entre autres un souvenir particulièrement marquant de sa voisine, elle-même malade : « Elle regardait si ma lumière était allumée et elle m’appelait pour me demander comment j’allais. » Ce geste simple, empreint d’attention et de générosité, a eu un effet réconfortant immense.
La difficulté d’accepter de l’aide
Joane reconnaît qu’accepter l’aide n’est pas toujours facile. « C’est un peu gênant de se faire aider quand on se dit qu’on est capable de tout faire ou presque tout seul. »
Elle précise que les offres les plus faciles à accepter sont celles qui visent une tâche précise : « Veux-tu que je t’aide avec ton gazon? », par exemple, est beaucoup plus aidant qu’un vague « as-tu besoin d’aide? ».
Une femme tournée vers l’avenir
Depuis le décès de son conjoint, et même si elle a elle-même connu des soucis de santé dernièrement, Mme Dubé n’a jamais cessé d’accompagner les autres : sa sœur, des amis, des voisins. Elle a aussi porté le dossier MADA (Municipalité amie des aînés) à Chartierville.
Son regard reste tourné vers la solidarité.
« Je vais continuer d’aider mon monde autour de moi, que ce soit des étrangers ou mes amis proches. Je vais continuer de les aider tant que je vais être capable. »
Un message pour demain
À travers son parcours, Joane Dubé rappelle qu’il est essentiel de mieux reconnaître et soutenir les proches aidants. Elle invite la population et les élus à s’intéresser davantage aux démarches comme MADA-Famille, qui permettent de prendre soin des gens en les considérant, en les écoutant et en leur offrant les ressources dont ils ont besoin.
Un immense merci à Mme Joane Dubé pour son témoignage.